Critique : The Last Days On Mars (2014)

The Last Days On Mars 1

Mars et crève.

Du romantique au cœur brulant au nazi d’outre-tombe, les zombies investissent l’ensemble du terrain cinématographique au point même de pouvoir les entendre aujourd’hui clapper à la surface de la planète rouge. Incontestablement, il y a quelque chose de pas très clair qui flotte dans l’air de Mars. Dépourvu des peintures tribales et des armures jadis portées par le Big Daddy de John Carpenter, ces morts vivants emboitent davantage le pas à cet astronaute carbonisé par son incandescente fascination pour l’astre solaire détourer par Danny Boyle qu’aux carnassiers efflanqués de George A. Romero. Une bactérie, semble prescrire la thèse avancée par réalisateur Ruairi Robinson, transforme donc de braves humains en cannibales décharnés. Mais au final, il fait peu de cas de la nature indicible de cette menace invisible asséchant le corps et drainant la mémoire de son hôte, du moment que les survivants qu’il met en scène résistent et prouvent qu’ils existent, par leurs corps ainsi que par leurs esprits. À charge ensuite au cinéaste de jouer efficacement sur cette terreur virale. Ciseaux et perceuse deviennent alors les outils idéaux pour fendre la fine cuirasse en tissu qui sépare la chair de l’atmosphère martienne, scellant par la même le tragique destin de nos malheureux astronautes. De ce seul fait, les scènes de corps à corps deviennent particulièrement angoissantes alors même qu’elles se réservent nécessairement le droit de jouer la carte d’une économie visuelle imposée par son modeste budget. Développant son récit dans les intérieurs aseptisés d’un avant-poste scientifique et de modules de transports tout en jouant au maximum sur le hors champ et sur un montage syncopé, le film coupe à toute complexité graphique comme avait pu le faire Duncan Jones sur l’orbite lunaire afin de s’assurer de pouvoir offrir des extérieurs de toutes beautés, des effets spéciaux solides et des maquillages crédibles. Des efforts esthétiques qui ne dissimulent pour autant pas totalement les inquiétudes concernant la capacité de ces derniers jours sur Mars à offrir une expérience distante de celle proposée par les productions génériques. Mais une fois brisée le manteau rocheux d’un récit aux mécanismes narratifs et aux personnages éprouvés, on savoure la constante recherche du réalisateur à vouloir élever le niveau de lecture de son survival. Par petite touche, lui et son scénariste, Clive Dawson, composent une atmosphère empreinte d’une épouvante mélancolique, celle de se faire dévorer par le vide, celui de l’espace, celui du cortex à tout jamais corrompu par cette contamination. À la tête de cette expédition, l’imposant Liev Schreiber, acteur à la présence bestiale trop souvent envoyé au charbon de métrages de seconde zone, incarne remarquablement ce spleen qui tente de s’infiltrer dans chaque pore de ce trip martien qui vise à une proposition de qualité plus qu’à une invitation à l’originalité. (3/5)

The Last Days On Mars 2

The Last Days On Mars (Grande-Bretagne, 2013). Durée : 1h41. Réalisation : Ruairi Robinson. Scénario : Ruairi Robinson, Clive Dawson. Image : Robbie Ryan. Montage : Peter Lambert. Musique : Max Richter. Distribution : Liev Schreiber (Vincent Campbell), Elias Koteas (Charles Brunel), Romola Garai (Rebecca Lane), Olivia Williams (Kim Aldrich), Johnny Harris (Robert Irwin).

14 commentaires

    1. Je ne veux pas casser tes espoirs, mais la musique de Max Richter est étonnamment mise en retrait (hormis sur deux ou trois scène). Ce qui est dommage compte tenu du fait que c’est une musique très atmosphérique qui marche beaucoup grâce aux images. Ceci étant, je t’encourage à découvrir ce petit film de SF.

  1. Si j’ai bien compris, le départ pour cette expédition martienne ne se fait que dans nos canapés domestiques. Dommage au regard des qualités esthétiques dont tu te fais rapporteur dans cet article écrit une fois encore d’une plume magnifique et élégante.

    1. Rolala !!! Que de louanges, que de louanges ! 🙂 J’aimerais d’ailleurs bien avoir un de ses jours ton avis sur ce film.

    2. C’est gentil, merci 🙂 J’ai toujours du mal à pendre au sérieux les compliments que l’on me fait. Question de nature…

    1. C’est un film sympa et qui se laisse très bien regarder. J’espère qu’il te plaira autant qu’à moi.

  2. J’ai bien apprécié cette série B moi aussi. Parce qu’elle soigne son univers (on a là le Mars le plus crédible que j’ai pu voir au cinéma avec le film de DePalma), parce qu’elle est cohérente scientifiquement parlant, parce que ses personnages sont bien construits (à l’exception peut être du psychiatre pas très maître de lui) et que le rythme est bien dosé. Maintenant, une fois qu’on a compris le sujet, zombie, on n’aura plus aucune surprise… C’est son seul défaut, il abat toutes ses cartes à mi-parcours, et il n’a plus grand chose à proposer après, sinon continuer à exploiter la formule.

    1. C’est clair que le film aurait gagné à préserver le mystère autour de sa menace, à se la jouer The Thing pour gagner en efficacité. Mais comme tu le dis, on se laisse happer par son décor et son ambiance.

  3. Pas vu mais la jaquette (et la pub par la même occasion la pub reprenant le visuel) que j’ai vu dans Mad Movies est dégueulasse au possible. On dirait une énième série B de merde venant d’Asylum. Alors que je sais très bien que l’affiche original tout comme ce que j’avais vu en bande-annonce était loin d’être un truc Syfy.

    1. Comme toi, j’ai trouvé vraiment bizarre que l’éditeur ait choisi une jaquette de merde, presque sans rapport avec le film, alors que toutes les affiches sorties étaient suffisamment belles et accrocheuses pour donner envie d’acheter le film. C’est vraiment se tirer une balle dans le pied.

    2. Surtout que l’affiche en rouge (je pense que tu vois laquelle je pense) était tip top pour une jaquette. Là je dois t’avouer que sur le coup je n’avais pas fait plus attention mais l’autre jour je tombe sur le titre de la pub « putain mais c’est le film avec Liev Schreiber! »

    3. C’est vrai que ça brouille un peu les pistes cette jaquette, on ne fait pas tout de suite le rapprochement.

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