Bilan 2015

Bilan Une

Toile filante.

À peine avons nous aperçu la pointe de la comète qu’on se retrouve déjà a en contempler la queue. Le temps continue ainsi de filer à une vitesse démentielle sous nos regards impuissants. Un regard que cette année cinématographique ne se contraignit d’ailleurs pas à flatter.

Face à une offre de nature industrielle, il est certes extrêmement difficile de maintenir une forme homogénéité, dans l’excellence comme dans la médiocrité. Mais il n’est pas non plus interdit de croire au père noël et de rêver d’un chef d’œuvre chaque semaine. Malheureusement, l’immense majorité des longs métrages sorties cette année furent de simples messages tracés dans le sable de nos esprits, d’éphémères inscriptions que l’écume du temps viendra effacer pour laisser, derrière son mouvement régulier, une plage nouvellement vierge. Seul les cinéastes les plus aguerris, les plus sincères ou les plus inspirés sont ainsi parvenus à graver leurs passages dans le marbre de nos esprits endurcis.

TopAinsi, Pete Docter et Ronnie Del Carmen mirent nos émotions sans dessus-dessous dans une pétillante aventure intérieure (Vice-Versa, n° 1). Des souvenirs de jeunesse, on passe à ceux de la grande guerre et de l’exode massif qui accompagna l’arrivée des panzers allemands sur le territoire français en mai 1940. Une page oubliée que le réalisateur Christian Carion restaure avec une flamboyante sincérité (En Mai Fais Ce Qu’il Te Plait, n°2) alors que l’autre Christian lui a préféré le parquet d’une cour de justice, pénétrant sans emphase le revers de l’hermine d’un Fabrice Luchini magistral de retenu (L’Hermine, n° 3). Michael Mann, quant à lui, brisa une nouvelle fois les codes du genre pour programmer un thriller abstrait à l’intelligence loin d’être artificielle (Hacker, n°4). L’abstraction, c’est ce vers quoi tendait également le dernier essai de Dennis Villeneuve, dont la narration dégraissée jusqu’à l’os n’avait d’égal que la brûlante intensité de sa mise en scène (Sicario, n° 5). Et puis, il y avait les autres : Tom Cruise et ses missions toujours plus impossibles (Mission: Impossible – Rogue Nation, n°6), Marvel et son fourmidable super-héros (Ant-Man, n°7), Philippe Claudel et la vie d’un garçon dans la banlieue de Nancy (Une Enfance, n°8), Steven Spielberg et son jeu d’espion (Le Pont Des Espions, n° 9), et Clint Eastwood et son soldat blanc au cœur noir (American Sniper, n° 10).

FlopDu côté des souvenirs déjà emportés vers le lointain : Luc Besson, prodrome d’un cinéma français accommodé à la sauce américaine qui a cessé depuis plusieurs années d’incarner l’avenir du septième art. Sans surprise, sa dernière coquecigrue made in Europa passe au pilon de notre mémoire (Taken 3, n° 1), suivit de près par le ridicule dernier volume apporté à la saga de James Cameron (Terminator Genisys, n° 2). Au rebut, également, la dernière aventure capillotractée de l’agent 47 (Hitman – Agent 47, n°3), tout comme celle de Johnny Depp, dont la permanente mue dissimule plus péniblement à chaque film sa mauvaise fortune artistique (Charlie Mortdecai, n°4). Pour les autres, les vengeurs mutants (Avengers 2 – L’Ère d’Ultron, n°5), les esprits frappeurs (Poltergeist, n°6), les robots aux comportements anthropomorphiques (Chappie, n°7), les artistes aux yeux aussi gros que leurs égos (Big Eyes, n°8), les coureurs de dédales (Le Labyrinthe – La Terre Brulée, n°9) et les cuisiniers étoilés (À Vif, n°10), il faudra beaucoup de temps et d’énergie pour les arracher à leurs tristes sorts.

Mais ne jamais oublier que la qualité d’un film importe moins que la vie elle-même. Profiter de l’instant présent, devant un navet ou un chef d’œuvre, c’est tout ce qui compte. Carpe diem, les amis.

27 commentaires

  1. La parole du vieux sage a une fois de plus atteint notre intimité rétinienne.

    Si nous n’avons que deux titres en commun, l’élévation du « Hacker » au rang des films qui ont compté cette année montre que nous nous retrouvons sur le principal. Et puis chez moi, s’il ne figurent pas en tête de liste, je puis t’assurer que Spielberg, Eastwood et McQuarrie ne sont pas loin.

    Je te souhaite une très bonne année 2016 et plein de bons films sur lesquels philosopher.

    1. Je viens de me revoir le pilote de « Miami Vice » : c’est dingue comme cette série à l’esthétique MTV a influencé le style actuel, des effets que l’on retrouve encore dans le plus récent des films de Mann (les plans dans le port, cette manière incomparable de filmer la ville, l’utilisation de musiques synthétiques et d’une B.O. soigneusement choisie). Certes, certains aspect ont vieilli (les fringues, le côté frime dans l’air du temps) mais pour une série grand public, il y avait quand même des moments de grâce autrement plus puissants que ce qu’on pouvait voir alors.

    2. Il faudrait que je me penche un peu plus sur la série Miami Vice, qui demeure une simple vue de l’esprit. Mais tout ce que tu me dis confirme ce que j’ai pu découvrir dans le très bon essai proposé par Axel Cadieux sur le cinéaste.
      Par ailleurs, j’ai redécouvert pour la énième fois sa cathédrale criminelle et romantique habité par le duel De Niro/Pacino (Heat, pour ne pas le citer). J’en suis une fois encore ressorti subjugué par cette harmonie formelle, narrative et musicale qu’il parvint à créer, bien que les sorties de route de Pacino me paraissent parfois un peu too-much.
      Collateral, Révélations et Miami Vice demeure aujourd’hui au sommet de ma « top-list » Michael Mann.

    3. Ah Pacino, il est comme ça. Mais quelle puissance d’interprétation tout de même, quel tempérament quand il fait le malin sous l’objectif des truands qui l’observent, quand il se porte au secours de son collègue mortellement blessé pendant la fusillade, ou quand il descend à toute vitesse les escaliers de l’hôpital. Tiens, voilà que je me dis que ça fait bien trop longtemps que je n’ai (re)vu « Heat ». Mais je vais me programmer ça un de ces jours, à l’occasion d’un tir groupé. Une opération largement motivée par ce retour nostalgique sur la série des eighties. Par contre, j’ai vraiment du mal à faire un classement chez Mann (j’ai longtemps eu des réserves sur « le dernier des Mohicans » mais une fois revu, je me suis pris une claque).

    4. Je dois t’avouer que Le Dernier Des Mohicans, avec Manhunter, sont les seuls films de Mann que je n’ai pas encore découvert (avec son téléfilm, The Jericho Mile).

  2. Mon bilan perso frôle la rupture de stock, pas de publication envisagée ….
    Une bonne & heureuse année je te souhaite cependant.
    Déjà vu Creed & The Hateful Eight …… Oui bof, j’ai vu des années qui démarraient mieux.
    ++

    1. The Hateful Eight, bof… j’attends de voir ça. Pour Creed, m’étonne pas trop.
      Bonne année à toi aussi Ronnie 🙂

  3. Pas très étonné de ce flop 2015 (pour le moment, je ne rebondis pas encore sur le top) avec Taken 3 suivi en effet de très près par le dernier Terminator en date.Certaines franchises ne devraient jamais être relancées

    1. Meilleurs vœux à toi Olivier 🙂
      D’ailleurs, lorsque j’ai établi mon flop, j’avais totalement oublié le fait que Taken 3 était sortie cette année. Ma mémoire l’avait déjà enterré.

  4. Zut on n’a rien en commun 😦 Il faut dire que je n’ai pas forcément vu tous les films cités 😮
    En tout cas, je te souhaite une très bonne année 2016 🙂

    1. « Zut on n’a rien en commun » : sauf le plaisir d’écrire sur le cinéma 🙂
      Merci pour les smiley, et bonne année à toi 🙂

  5. C’est marrant, parce que je n’en ai vu aucun ! Si, peut-etre Mission Impossible, mais je n’ai pas été si transcendée que ça… Et puis Vice-Versa, je regrette tellement de ne pas l’avoir vu au cinéma, mais je vais me rattraper, parce que tu l’as mis en number 1, et que j’ai vraiment super envie de le voir !

    Allez, j’espère vraiment que cette nouvelle année sera bien meilleure !

    1. J’espère également que cette année sera plus surprenante – dans le bon sens.
      En ce qui concerne Vice-Versa, je suis sûr que tu vas adorer 🙂

  6. Découvert Hacker récemment, une très bonne surprise, noire et déstabilisante. Pas au point de le mettre dans mon top, mais un beau film quand même qui fait partie du haut du panier de 2015. Et sinon bonne année hein, l’amour, l’argent, la santé, tout ça !…

    1. Je l’ai d’ailleurs revu avant-hier. Un film fascinant, à tout point de vue, qui gagne en intêret au fil des visionnages.
      Je te souhaite également une très bonne année (bien que cela soit déjà fait).

  7. Nous n’avons que « Sicario » en commun mais je t’avoue que j’aurai pu ajouter « Mission impossible ». C’est un des blockbusters les plus divertissants de l’année.
    J’en profite pour te souhaiter une bonne année 2016 🙂

    1. Sicario en commun, c’est déjà pas si mal ! 🙂
      Meilleurs vœux à toi (encore une fois).

    1. Tu pourrais bientôt rattraper ton retard pour Sicario. Concernant Hacker, il est toujours temps de se le procurer en vidéo (en Bluray, de préférence).

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